Le Deerhound

 Le Scotch Deerhound (chien écossais pour daims).

Le Deerhound grâce à sa taille élevée et à son poil dur, a l'air plus imposant que son frère le Greyhound, et il a certainement des personnes qui le placeraient à la tête de la famille. Ainsi que je l'ai déjà écrit, je considère tous le chiens de notre groupe comme issus d'une seule et même origine. Les différences qui les distinguent aujourd'hui proviennent de la variété des usages auxquels ils étaient destinés, l'éducation et la sélection ayant alors peu à peu dégagé et perfectionné les qualités propres au genre de travail qu'on exigeait de chaque race : c'est ainsi que se sont formés à la longue des signes caractéristiques divers, qui, fixés et consolidés par le croisement en dedans ont constitué des races définies. Je ne puis admettre la théorie extraordinaire que préconise un auteur que je cite un peu plus loin, théorie d'après laquelle le Deerhound a été fait exprès par la Providence et ne sert que pour la chasse du cerf, ce qui semble confirmer une théorie suivant laquelle chaque contrée possédait une race particulière de chiens pour son propre usage. L'homme peut arriver à façonner les animaux à sa convenance ; il l'a bien prouvé par les races canines actuelles ; et nous pouvons dire en toute justice que ces races, grâce aux soins que nous leur avons données, possèdent une perfection qu'elles n'auraient pas obtenue autrement. Rendons hommage et respect à la source suprême de notre puissance ; car, il serait insensé, pour céder à je ne sais quelle religion étroite et fausse de ne pas le reconnaître.

Souvent l'on confond le Deerhound (chien pour daims) avec le Staghound (chien pour cerf) ; et dans le catalogues des expositions du nord de l'Angleterre, celle d'Aberdeen par exemple, le Deerhound est classé sous la rubrique de Staghound. Il est utile de signaler ce fait pour empêcher des confusions ; en effet, en Angleterre le Staghound forme une classe complètement à part, qui, ne chassant qu'avec le nez à beaucoup d'analogie avec le Foxhound (chien pour renards), et n'est composée souvent que de Foxhounds d'une taille plus élevée. Le Deerhound prend aussi les noms de Rough Greyhound (lévrier à poil dur), de Northern Hound (lévrier du nord), et de Fleet-Hound (lévrier rapide).


Blome, en décrivant les chiens courants de son temps, après avoir parler du chien à voix profonde dit : « Quant au Northern Hound, ou Fleet-hound, sa tête et son nez doivent être plus minces et plus longs, son dos plus large, ses flans relevés, ses membres élancés, ses oreilles plus épaisses et plus courtes ; en un mot, il doit être plus léger dans toutes ses parties et construit dans le genre du Greyhound. »
Deerhound ans Gillie
Cependant, je ne sais lequel des deux Blome avait en vue, du Deerhound ou du Foxhound du Nord, léger, rapide et qui comparé à son congénère du Sud plus lent, à la voix profonde, peut être considéré comme se rapprochant du Greyhound par la forme.

Dans cet imposant ouvrage, appelé le Sportsman's Cabinet il n'est fait aucune mention du Deerhound écossais, et la description du Staghound, illustrée par Reinagle, est simplement celle du Foxhound actuel.


Richardson, qui fait autorité pour les chiens, écrivant il y a cinquante ans (vers 1850), émet l'opinion que le Woulfhound Irlandais (chien irlandais pour loup) est l'ancêtre du Deerhound écossais, opinion que je ne puis considérer comme suffisamment établie ; du reste nous en reparlerons en détail dans le chapitre du lévrier d'Irlande.


Pour les Deerhounds, Stonehenge, qui généralement écrit avec grand soin et précision, dit « En étudiant en détail la description donnée par Arrien,  il est impossible de ne pas se rendre compte que de son temps le Lévrier était à poil dur, et pareil en tout au Lévrier Ecossais actuel . » Mais au contraire Arrien est très explicite sur ce point et prouve qu'il connaissait parfaitement les deux variétés de chiens, lorsqu'il dit : « Les poils, que le chien fût à poil dur ou à poil ras, etc. …>. Je donne cette phrase à l'appui de ma théorie qui dit que tous les membres de ce groupe ont une origine commune. Idstone est disposé à croire « que cette race est importée » ; mais il ne donne aucune raison, et ajoute que « c'est une des races les plus anciennes que nous possédions ».

En ce qui concerne la taille du Deerhound, pour l'usage pratique que l'on en fait dans les Highlands, il paraît prouvé qu'un chien, ayant plus de 76 centimètres à l'épaule, est inutile. Un amateur qui fait autorité, et dont la famille se vante d'avoir conservé depuis 60 ans la race la plus pure des Highlands pour la chasse seulement, donne comme hauteur de « 66 à 71 cm », et ajoute : « Les chiens plus grands peuvent être très bons pour les courses, mais je ne suis pas convaincu, par expérience qu'un chien ordinaire accomplit mieux son travail. » L'opinion suivante des deux plus grandes autorités qui existent doit convaincre même ceux qui, par leur raisonnement et la direction de leurs efforts, soutiennent que les Deerhounds ne sont jamais assez grands et assez forts pour leur travail. Les amateurs dont je parle sont MM. Lochiel et Horatio Ross, les plus grands chasseurs existants dans le genre qui nous occupe, et peut-être bien les meilleurs sportsmen en tous genres. Le premier s'exprimer ainsi : « Quant à moi, je n'aime pas les chiens qui ont plus de 76 cm, et je préfère ceux qui ont une taille variant entre 71 et 76 cm trop grands, ils deviennent trop lourds et tout à fait inutiles pour un travail sérieux. Une taille trop forte provient souvent du genre de nourriture, et accompagne dans ce cas un chien lourd et mou, incapable de rendre les services qu'on lui demande,. » Le second fait observer que « pour chasser le daim, le taille variant de 71 à 76 cm est bien suffisante. Un très grand chien n'est jamais un bon chien, et il est généralement battu dans les montées. » A quoi sert la théorie en présence de telles opinions basées sur une si longue expérience ? Le Lt-Colonel Inge, qui a longtemps chassé dans une des plus grandes forêts d'Ecosse, et dont le chenil des Deerhounds s'est très bien vendu à Aldridge, il y a quelques années, était du même avis et considérait les grands chiens comme inutiles pour la chasse. J'ai connu personnellement cinq chenils des Deerhounds dont les maîtres chassaient en Ecosse ; et ces messieurs m'ont toujours dit que les très grands chiens ne servaient à rien. Les propriétaires des trois fameux Deerhounds d'exposition, d'environ 78 cm de taille, et d'un quatrième qui est célèbre en Amérique, m'ont avoué qu'ils avaient vendus leurs chiens parce qu'ils les trouvaient trop grands pour servir en Ecosse ; cependant, de ces quatre chiens, trois étaient bien proportionnés et de belle apparence pour leur taille, et pas un de dépassait 78 cm à l'épaule. Ces chiens s'appelaient Old Torunn, Bran (premier prix Crystal Palace, 1872), et Sir Boriss. Quant au quatrième, il ne fut jamais exposé en Angleterre. On se rappellera peut-être que Buskar, à M. Mc Neil, le plus grand de tous les chiens qui prirent part à cette course au daim que Scope à décrite dans son livre sur « La chasse à l'affût des grands animaux » n'avait que 70 cm de hauteur. Pour voir le croquis d'après nature qu'en a fait Landseer, il faut aller à la galerie Nationale, à Londres, collection Bell. On y trouvera certainement le corps un peu léger, mais il ne faut pas oublier, que de l'avis de Mc Neil, se portrait ne rendait pas justice à la forte charpente et la vigoureuse apparence de son Deerhound. Il devait en être ainsi, puisque
Deerhound Bran
Bran de la race M'Neill
Buskar avait 80 cm de tour à la poitrine, c'est à dire 10 cm de moins que sa hauteur ; or, peu de Deerhounds atteignent une telle largeur de poitrine proportionnellement à leur taille. Tout le monde sait que les chiens de M. Mc Neil chassaient dans l'Ile de Jura et n'étaient pas exposés à faire sortir les cerfs et les daims de la propriété, comme cela arrive sur le continent. Si donc, les chiens de M. Mc Neil dont la taille ne dépassait jamais 70 cm, étaient capables de forcer et d'abattre un cerf intact, on peu en inférer qu'il est inutile d'avoir des chiens plus grands pour la chasse à l'affût telle qu'elle se pratique aujourd'hui, où l'on utilise leurs services guère que pour retrouver l'animal blessé.

Il résulte de ce que nous venons de dire que les très grands chiens sont à peu près inutiles pour la chasse pratique des daims ou des cerfs. Doit-on en conclure de là que les Deerhounds d'exposition doivent être nécessairement petits ? Assurément non. Tout le monde aime un chien de belle taille et de noble prestance, et peut-être est-il permis de tolérer dans un sujet d'exposition un léger excès de taille ; mais ce qui est condamnable, c'est le fait de primer un chien par la seule et unique raison, qu'il est grand, lourd et massif, en un mot parce qu'il possède les soi-disant qualités qui le rendraient complètement impropre à remplir les fonctions auxquelles il est destiné. Je crois pour ma part que les chiens mesurant 76 cm de hauteur sont assez grands pour tous les usages ; et les éleveurs emploieraient mieux leur temps à améliorer la qualité en alliant la vitesse à la force, au lieu de chercher à vouloir dépasser cette moyenne.

Les motifs de l'abandon progressif du Deerhound en Ecosse sont bien connus ; ce sont : la plus grande précision des carabines modernes et l'extrême subdivision des forêts et droits de chasse, résultant de la multiplicité des demandes à satisfaire. Autrefois, lorsque les grands propriétaires ou les chefs de clans écossais conservaient la jouissance de leurs vastes domaines avant d'avoir compris quels monceaux d'or ils pouvaient retirer de leurs collines désolées et de leurs sauvages bruyères, que leur importait de troubler les grands animaux et de les chasser plus ou moins loin ? Maintenant au contraire que les forêts de chasse se sont multipliées au détriment de leur étendue, on a perdu l'habitude d'utiliser le Deerhound, dont la poursuite effraye et fait émigrer les grands animaux plus que toute autre chose, et même dans beaucoup de baux, l'usage de ce chien est interdit.

On lira avec intérêt ce que dit à ce sujet le capitaine Horatio Ross, dont les paroles ont ici une autorité toute particulière, puisqu'il a chassé les grands animaux à l'affût pendant cinquante ans : « Le Deerhound Ecossais de race pure est, à mon avis, le plus beau des chiens. J'aime par habitude et par souvenir le vieux Deerhound de race pure. Cependant ce n'était pas un animal intelligent ou malin. On ne peut pas nier qu'il fût audacieux, rapied et doué d'un vue perçante ; mais si par hasard les inégalités du terrain arrivaient à lui dérober le cerf, que celui-ci fût blessé ou non, tout était fini. Il allait de droite à gauche, bondissant affolé ; et s'il apercevait une harde d'animaux frais, il se précipitait vers eux et les poursuivait quelquefois pendant quinze kilomètres. L'on sait aujourd'hui que le cerf vigoureusement poursuivi par les chiens, retourne rarement sur le terrain d'attaque. C'est pour cette raison que dans ces derniers temps on préférait les Lurchers, ou chiens bâtards de braconnier, pour retrouver les animaux blessés ; ces chiens provenaient du croisement du pur Deerhound Ecossais et du Foxhound. S'ils perdent de vue l'animal blessé, ils se mettent le nez à terre, et avec la persévérance du Foxhound, suivent à la trace, jusqu'à ce qu'il la retrouve. Actuellement ce sont les Mc Neil de Collossay qui possèdent les Deerhounds les plus purs. Ils chassent le cerf à courre, et non pas à l'affût, et ils considèrent comme un crime de le tuer au fusil. »

Le capitaine Ross possédait un fameux Deerhound, appelé Oscar, le père de tous les bons chiens de l'époque. Après la mort de cet animal, en 1846, il abandonna l'élevage de la race. « Depuis vingt-cinq ans, écrit-il dans l'introduction qu'il a faite pour le Manuel du tir à l'affût des grands animaux de Macrae, je n'ai pas employé de chiens pour chasser le cerf ou le daim. »


Il serait présomptueux de mettre en doute l'exactitude et la vérité du rôle que le capitaine Ross attribue aux Deerhounds en chasse, mais cependant plusieurs personnes assurent que certaines familles de cette race possèdent la faculté de suivre le gibier à la piste. Peut-être aussi, la lignée Mc Neil, habituée à forcer le cerf et de daim et élevée dans ce but unique, avait-elle, comme notre Greyhound, perdu à la longue ses facultés olfactives, et se trouvait-elle sous ce rapport très inférieure aux chiens employés sur le continent pour retrouver le cerf blessé. Qui qu'il en soit, M. Malcolm Clarke, qui se défit de son chenil à Édimbourg en 1881, prétendait que ses chiens chassaient aussi bien avec le nez qu'à vue. Les détails suivants sur son chenil intéresseront mes lecteurs, je n'en doute pas.
Deerhound Gunner

« L'exposant possède cette race depuis soixante-trois ans. Non seulement ce sont les meilleurs chiens de chasse que l'on puisse trouver, mais aussi ils sont parfaits dans leurs formes, comme le prouvent les différents portraits que l'on a fait d'eux. Le propriétaire, pour maintenir la supériorité de la race, les a croisé de temps en temps avec les meilleurs chiens du chenil de feu le Duc de Leeds et de Lord Henry Bentick.

« Horatio Ross écrivait à M. Malcolm Clarke à propos de ses chiens : « Lorsque je les voyais travailler dans les forêts de Mar Lodge et de Glengeshie, ils me paraissaient être de premier ordre. J'ai chassé les grands animaux pendant plusieurs années dans ces forêts avec le duc de Leeds, ses meilleurs Deerhounds venaient de chez M. Malcolm Clarke. » Fly, leur mère à tous, était de cette ancienne race dite de « Gruagach » que l'on considère depuis très longtemps comme la meilleure et la plus pure de l'Ecosse ».

« Ces chiens étaient presque tous d'une couleur fauve tirant sur le jaune, plein de caractère, de taille moyenne. Cependant, l'un d'entre eux, Ossien d'un gris jaunâtre, avait près de 76 cm de hauteur, c'était un chien de premier ordre ; il atteignit du reste le prix le plus élevé à la vente, et fur acheté par Lord Grosvenor, qui le connaissait. »

Ce qui menace aussi de faire beaucoup de tort à la race des Deerhounds, c'est la tendance qui existe actuellement à confondre l'Irish Wolfhound (chien irlandais pour loups), dont la race est éteinte depuis longtemps, avec un Deerhound de taille grotesque. Pour obtenir cette taille si au-dessus de la moyenne, on a croisé le Deerhound avec plusieurs races très grandes, et même, je crois avec le Saint-Bernard ; mais les résultats n'ont pas été satisfaisants, car, bien qu'on ait obtenu de la lourdeur et de la masse, il ne semble pas qu'on ait augmenté la taille. Quelques-uns des produits ainsi obtenus ont été classés aux expositions comme des Deerhounds ; mais, avec leur sang mêlé, ces chiens ne feront aucun bien à la race, s'ils lui transmettent les qualités qui leur sont propres.

Nous venons de voir ce que le Deerhound ne doit pas être, étudions à présent ce qu'il doit être. Sans nul doute, ce chien n'est autre que le grand lévrier à poil dur d'autrefois, destiné, comme le dit Hollinshed, à chasser les grands animaux, tels que daims, cerfs, etc. …, et probablement aussi répandu à une certaine époque en Angleterre qu'en Ecosse. La disparition des grands animaux à l'état sauvage, survenue en Angleterre beaucoup plus tôt qu'en Ecosse, permet de comprendre pourquoi ce chien s'est conservé dans ce dernier pays, après avoir disparu du premier.

L'on faisait alors usage en Angleterre de grands Lévrier à poil long et dur ; les écrits de Caius, D'Holinshed et de plusieurs autres auteurs ne permettent pas d'en douter et cette certitude est un argument de plus contre la théorie de Richardson. En effet, si le Chien d'Irlande n'avait été qu'un simple Lévrier à poil dur, il n'aurait pas été remarqué. Mais il est de toute évidence que c'était un animal d'une espèce particulière, propre à l'Irlande ; en un mot, autre chose qu'un simple lévrier à poil dur. Le Lévrier de Russie est encore un autre spécimen du Grand Lévrier à poil dur d'autrefois, et cependant je n'ai jamais entendu dire qu'il était d'origine irlandaise.

Le capitaine Grahmam, dans son Book of Dog,  nous dit qu'il a été fait mention pour la première fois du Deerhound en 1769 , par Pennant ; et plus loin, il déduit de ce fait son principal argument en faveur de la théorie qu'il émet sur le Wolfdog. Voici comment il s'exprime : « Tandis que, depuis une époque reculée, toutes les races intéressantes, y compris celle de l'Irish Wolfdog, nous sont décrites, il n'est fait mention nulle part du Deerhound, si ce n'est dans des écrits relativement modernes ; c'est ce qui, dans une certaine mesure, nous autorise à supposer que les Deerhound est le représentant moderne de ce superbe animal. »

Maintenant, si elle est exacte, ma théorie, d'après laquelle le Deerhound n'est autre chose que le grand Lévrier à poil dur dont on se servait pour chasser les grands animaux, peut très bien se défendre. Cette lacune n'est qu'apparente et peut s'expliquer, puisque nous ne manquons pas de renseignements sur cette espèce de lévriers. Il est à remarquer que, même de nos jours, les Highlanders donnent souvent au Deerhound le nom de « Greyhound ». Autrefois un propriétaire m'a affirmé que les gardes de ses forêts se servaient toujours du mot « Greyhound », et j'ai en ma possession des lettres de propriétaires dans les Highlands, dans lesquelles les termes de Greyhound, Staghound et Deerhound, sont indifféremment employés ; en réalités, on se sert maintenant beaucoup plus du terme Staghound que du mot Deerhound.
Deerhound show 1880

Nous ne pouvons donc pas nous étonner de ne pas trouver le mot Deerhound employé anciennement, lorsque le Greyhound n'est mentionné que sous le nom de Highlands Greyhound ou sous quelque dénomination équivalente. Les Irish Greyhound, dont fait mention Taylor en 1620, étaient certainement des Deerhounds ; mais, enfin d'empêcher tout ergotage sur les termes, je m'en vais montrer que le mot propre « Deerhound » était en usage il y a déjà longtemps et bien avant qu'on ne puisse admettre une dégénérescence quelconque du Wolfdog. Voici ce que l'on peut lire dans l'Histoire d'Ecosse de Piscottie, publiée vers 1600 : « Le roi Jean /Jean V d'Ecosse qui régnait en 1528) exprima le désir que tous les nobles qui possédaient des bons chiens, eussent à les amener et à les réunir pour chasser ; presque toute la noblesse des Highlands se conforma à la volonté royale, entre autres les Comtes de Huntley, l'Argyle et d'Athol, qui amenèrent avec eux leurs Deerhounds et chassèrent avec Sa Majesté. »

Ce passage me paraît concluant et détruit complètement ce qui peut rester de l'argumentation au moyen de laquelle Graham a voulu prouvé que le Deerhound et l'Irish Wolfdog n'étaient qu'un seul et même chien.

En effet, cette assertion tombe de soi lorsque l'on considère que le Wolfdog Irlandais n'a été importé en Ecosse qu'à une époque où les Deerhounds s'y trouvaient déjà en grand nombre, et n'avaient certes pas eu le temps de dégénérer. Quant à prétendre, comme le font les défenseurs des théories de Richardson, que le nom de Deerhound (chien pour daims) n'a remplacé celui de Wolfdog (chien pour loups)qu'après le changement survenu dans la nature du gibier que poursuivaient ces chiens, et que par conséquent le terme de Deerhound est tout à fait moderne, cela me paraît singulièrement fantaisiste devant ce fait que le nom du Deerhound est employé depuis plus de 300 ans. La théorie que nous combattons ne repose donc sur aucun argument sérieux.

Dans les temps moderne, la race de M. Menzie de Chesthill est sans aucun doute la plus ancienne dont nous ayons connaissance. Un amateur du pays a acheté il y a quelques années un chien nommé Ossien à la vente de Menzies, me fit savoir que cette famille prétend avoir conservé depuis 100 ans le sang de ces chiens complètement pur. Ossien est le grand père de mon champion Cuchullin.

Après cette race de Chesthill, on pourrait classer par ancienneté celle de M. Grant ; car le capitaine Basil Hall, qui fit en 1848 la description de ces chiens et par conséquent les avait vus peut-être un an auparavant, prétend que Grant avait conservé cette race pendant 30 ans ; cela nous ramènerait à peu près à l'année 1815.

A ma connaissance le Capitaine Basil Hall n'a jamais été cité au sujet des Deerhounds ; ce qu'il en dit cependant est si intéressant que je me permets de rapporter quelques-unes de ses paroles. D'après lui, Glenmoriston aurait eu son premier chien du Capitaine Macdonald de Moray, dans lle Braes de Lochaber. Ayant entendu parler d'une très belle chienne pur-sang. Célèbre par son grand courage et sa force de résistance, appartenant à M. Mackenzie d'Applecross, Glenmoriston proposa à ce dernier de s'associer à lui pour entretenir avec soin cette race. Mackenzie ayant refusé, la chienne fut amenée à Invermoriston ; depuis cette époque, de 30 ans environ antérieure à celle des écrits de Hall, la race est restée pure de ce coté.


Le Capitaine Hall nous dit ensuite que Glenmoriston céda cette race peu après à M. Ellis de Glengarry ; puis il ajoute :
« Quoi qu'il en soit, il faut se donner beaucoup de mal et surmonter de nombreuses difficultés pour arriver à élever ces chiens et à conserver leur sang pur. Croisez-les seulement une seule fois, et vous trouverez dans la portée un choit à poil ras (c'est ce qui est arrivé à Grant) ; à partir de ce moment, vous aurez toujours un ou deux chiots à poil ras. Je dois cependant avouer, de ce qu'ils sont à poil ras, ils n'en sont pas moins rapide et courageux.

Les chiots sont excessivement délicats et demandent beaucoup de soins et d'attention. Glengarry, qui a une certaine époque possédait plusieurs de ces chiens, avait l'habitude de les croiser, ainsi que le font encore aujourd'hui certains propriétaires. Il n'est pas douteux cependant que ces derniers sont dans l'erreur, du moins si leur but est d'avoir une race de chiens capables de poursuivre, de chasser, de tuer, ou de mettre aux abois les grands animaux. Le Deerhound est un Deerhound, ou bien c'est un bâtard ; il ne peut y avoir de race intermédiaire. »

« Ainsi, croisez un Greyhound avec un Terre-Neuve ; le bâtard que vous obtiendrez sera capable de tuer un lièvre, mais comment ? par un pur hasard ; il ne pourra cependant jamais remporter la coupe d'Altcar. Il en sera de même si vous croisez le Deerhound avec le mastiff ou le Bulldog ; ce croisement que l'on a déjà essayé, pourra développer légèrement quelques-unes des qualités particulières aux deux dernier chiens, mais en même temps il diminuera plusieurs des qualités remarquables du Deerhound, qui sont le propre de la race pure. »


C'est ainsi que les chiens de Glengarry en étaient arrivés à « avoir de grands pieds, des têtes fortes et laides et d'autres vices de conformation, qui les rendaient incapables de courir sur un terrain dur ou rocailleux, sans être mis hors de combat ou sans tomber boiteux. »
Deerhound Kennel 1880
Viendrait ensuite, toujours par rang d'ancienneté, la race de Mc Neil de Colonsay, décrite par Scope en 1839. Nous avons déjà parlé de ces chiens.


Remarquons ici que le capitaine Hall prétend avoir possédé deux chiens Glenmoriston ainsi qu'un troisième d'une autre provenance et d'avoir donné l'un des trois à un de ses amis d'Irlande. Peut-être était-ce un des descendants de ce chien que l'ami du capitaine Graham prit pour un Woldog vers 1840. Dans tous les cas, nous pouvons constater que dès cette époque des Deerhounds avaient été envoyés en Irlande.

Le général Hugh Ross et le colonel David Ross possédaient aussi il y a quelques années un beau chenil à Glenmoidart ; ce qu'il en reste y compris Oscar, 1er prix à Birmingham en 1865 et 1866, est devenu la propriété d'un de leur parent, le major Robertson qui malheureusement à perdu le Livre des Origines du chenil

Le colonel Campbell de Monzie était aussi connu pour son chenil de Deerhounds, il y a quelques trente ans, et Gruamach, père de Torunn, à M. Lochiel, et de Pirate, est peut-être le plus célèbre de ses élèves.

Sans aucun doute c'était un très remarquable animal, et je me permet d'ajouter, sans vouloir me vanter aucunement, qu'un amateur, grand éleveur de Deerhounds pendant environ trente ans et parfait connaisseur, m'a certifier que Gruamach et Morny étaient les deux plus remarquables Deerhounds qu'il eût jamais vus. Le même éleveur m'a raconté que Gruamach, horesco referens, fut dans ses vieux jours tué et mangé par ses compagnons de chenil ! Ceci est à peine croyable, et c'est, il faut le dire, une mauvaise note pour le caractère du Deerhound. Dans une conversation que j'eu quelques années plus tard avec le piqueur à qui était confié le chenil où le fait d'était passé, j'appris les détails de cette fin tragique. Il paraît que les jeunes compagnons de Gruamach fatigués de la tyrannie qu'il exerçait sur eux depuis trop longtemps, se réunirent une nuit contre lui et lui firent le triste sort que je viens de raconter.

Deerhound Morna
Morna
Je crois que l'essai le plus heureux qui ait été fait dans l'élevage des Deerhounds d'exposition est celui que tenta mon amis Pershouse Parkes, lorsqu'il fit saillir Brenda, la propre sœur de Morni, par Torrun à M. Master. La portée qui en résultat renfermait à elle seule plusieurs sujets célèbres, tels que Torunn (jeune) à M. Master, champion Teeldar à M. H. P. Parkes, Hylda à Lord Saint-Léornard, et Meg à Mr. Lewis, tous vainqueurs à Birmingham et à d'autres grandes expositions. De plus, le sang de ces chiens, ou celui de leur proche parent Morni, se retrouve encore aujourd'hui dans presque tous les sujets d'exposition.

Comme exemple de la difficulté qu'il y a à bien choisir un chiot dans une portée de Deerhound, je citerai ce fait que, ayant à désigner sur une portée de six chiots vivants ceux qu'il voulait vendre, l'éleveur de Morni et Brenda sacrifia précisément ces deux derniers. Je me rendis acquéreur du chien pour une somme minime, et la chienne Brenda fut donnée à un ami. Or, le chien devint plus tard Champion Morni, le meilleur Deerhound de son époque, bien qu'il ait cessé de paraître en public dès l'age de six ans, et la chienne fut mère et grand mère d'une innombrable série de vainqueurs, et c'est la meilleure lice du temps. On peut appeler cela de la chance !

Comme propriétaire je me fait sans doute illusion sur mon bien, et peut-être faut-il en rabattre de mes éloges ; mais, à dire vrai, il m'est impossible de citer un chien qui ait combiné plus que Morni la beauté, la symétrie et la force : il était d'une bonne hauteur et d'une longueur proportionnellement supérieure à la moyenne ; il avait avec cela une poitrine excessivement profonde et des reins énormes, avec l'arrière-train d'une largeur étonnante, l'avant-bras magnifique, et en même temps la silhouette parfaite du Greyhound. Il possédait aussi cette apparence typique et ce caractère qui manquent en général à nos spécimens actuels. On ne lui trouva jamais qu'un seul défaut : son poil était trop doux ; mais cela venait de ce qu'on l'avait élevé comme un chien d'appartement. S'il avait été relégué au chenil, son poil serait devenu bien assez dur ; d'ailleurs c'est la dureté même en comparaison de ce que nous avons vu depuis chez nos premiers prix d'expositions.

Pirate, à M. Lochiel, était un des plus beaux chiens que j'aie vus ; il mesurait 73.5 cm à l'épaule ; sa charpente était solide et ses proportions harmonieuses ; il avait un poil assez dur et de bonnes longueur ; il était en un mot, ce que doit être le Deerhound : la force et la vitesse combinée ; sa couleur était de ce bleu foncé qui est si prisé et si rare.

M. J. Addie possédait un chien de proportions charmantes, nommé Arran ; il était bien connu il y a une douzaine d'années. Sa taille dépassait 76 cm à l'épaule ; il avait une poitrine étonnamment profonde, un rein de premier ordre, des membres solides et parfaitement conformés ; son poil était bleu foncé ; presque noir, mais trop clairsemé, spécialement sur la tête et les jambes : c'était là son principal défaut.
Brenda, à m. Parker, fut saillie par lui : telle est l'origine de Borna et Léona, au même propriétaire, et de mon chien Lord of the Isles, et l'on peut trouver dans ces descendances quelques-unes des meilleures qualités de leurs ancêtres.



Deerhound Ch Lord of the Isle
Ch Lord Of The Isle
Wallace, fils d'Arran, était un animal bien conformé, d'une taille moyenne 71 cm. C'est le manque de taille et l'absence de poil qui empêchèrent de le désigner, alors qu'il était chiot, comme sujet d'exposition ; on s'en débarrassa. Plus tard, à ce qu'il paraît, il prit un magnifique poil ; mais ce n'est que par un heureux hasard que M. H.P. Parkes l'employa comme étalon, car sa taille était considérée comme trop petite. Dans tous les cas, la première portée qu'il produisit donna quelques chiens de très grande taille, tels que : Lord of the Isles, Duncan à M. Parkes, et Haco à M. Sherman.
Haco, à neuf mois avait plus e 73.5 cm de taille, lorsqu'il fut acheté par moi à M. W.S. Sherman, de l'île de Rhodes, et expédié en Amérique. Durant son voyage il fit naufrage sur le côtes d'Ecosse, son pays natal, aux environs de Mull of Cantyre ; réembarqué, il arriva  à destination, et remporta le premier prix à la grande exposition de New-York en 1881.
La deuxième portée, par Wallace, hors la même chienne, donna à M. Parkes, Barva et sa célèbre chienne Léona, l'une des meilleures de ces dernières années. Barva était un vrai Deerhound ; d'une vitesse remarquable et sautant admirablement, il aurait fait un excellent chien de travail. Mais sa taille n'étant que de 71 cm, il n'eût aucun succès aux expositions et fût vendu pour l'étranger.

Nous pouvons remarquer ici que Wallace, de taille ordinaire, produisit des chiens de taille exceptionnelle ; de ce fait, il est permis de conclure qu'un animal même petit, mais ayant des ascendants de grande taille, peut transmettre cette qualité tout aussi bien que le ferait un de ses parents beaucoup plus grand que lui ; ceci rend justice au système que je préconise et qui consiste à ne pas toujours choisir dans une famille les sujets les plus grands et les plus gros dans le but unique de donner aux produits une taille élevée ; cette façon d'agir ne sert qu'a perpétuer la lourdeur et la vulgarité, sans pour cela donner nécessairement la taille que l'on désire.

Si, pour faire de l'élevage, vous vous servez de sujets de petite taille, choisis dans une famille dont les membres sont de grande taille, parfaitement conformés et bien typiques, vous pouvez être presque certain d'obtenir ces dernières qualités et très probablement la taille aussi, car « un nain, fils de géants, peut engendrer un géant ».

Il est bon de noter combien dans ces dernières années les chiennes ont été supérieures aux chiens. Pour un bon chien, nous trouvons trois ou quatre bonnes chiennes. Parmi ces dernières, il ne faut pas oublier Maida au docteur Haddon. C'était une bête remarquable, avec un poil superbe. Teeldar et Leona, à M. Parkes, étaient aussi deux animaux de premier ordre. Je pourrais en citer bien d'autres et faire défiler ici une liste fort longue de chiennes hors ligne, à coté desquelles les spécimens actuels feraient triste figure. Cette considération, jointe à la crainte de ne pas paraître impartial, lorsqu'il s'agit d'animaux contre lesquels mes élèves n'ont pas cessés de concourir pendant ces quinze dernières années, me porte à ne pas prolonger l'énumération de ces sujets d'élite.

Le Deerhound actuel d'exposition n'est pas suffisamment long et n'a pas assez le type de Greyhound ; son museau est épais, commun, ses oreilles lourdes, son poil laineux ; tout l'ensemble manque de distinction.  Ces défaut proviennent de ce que les éleveurs visent la taille seulement. On ne devrait jamais cherche à dépasser 76 cm à l'épaule, 83 ou 83 cm de tour de poitrine, et 61 cm au moins de tour de rein. Pour le reste, nous devrions nous efforcer de combiner la force et la vitesse avec la plus grande somme possible de « race », et de gagner en longueur, de manière à donner à la charpente de nos chiens, quelle que soit leur taille, une apparence longue et basse et non pas l'aspect dégingandé d'un échassier.


La description que je vais donner du Deerhound point par point n'est pas seulement l'expression de mon opinion personnelle,  mais elle se base sur tout ce que j'ai plus recueillir de renseignements, pendant le cours de longues années, auprès des premières autorités sur la matière, tant en Ecosse qu'ailleurs, L'on me répondra peut-être ce que me disait il y a peu de temps un partisan de la taille avant tout, au moment ou j'invoquais à ce sujet le témoignage d'une personne chez qui on élève des Deerhounds depuis des générations : « L'opinion d'un Ecossais, je m'en soucie comme d'un fétu ! » Ces mots dépeignent bien la règle de conduite que nous adoptons lorsque nous touchons aux races étrangères ; nous voulons enseigner aux moines du Saint-Bernard ce que doit être un Saint-Bernard, et nous persistons à donner le nom de Grand Danois ou de Boarhound (corrupton de mot Bauerhund) au Mastiff Allemand malgré l'avis des Allemands eux-mêmes *

Note du traducteur : Nous pensons que M. Dalziel commet ici une erreur. Le dogue allemand n'était à l'origine que le produit accidentel et bâtard du grand danois et d'un autre dogue, Espagnol ,de Bordeaux ou même du mastiff Anglais. Une sorte de race ainsi formé paraît aujourd'hui à peu près fixée en Allemagne ; libre à ses partisans de l'appeler Bauerhund ou Mastiff Allemand, mais il est difficile de donner ce nom aux dogues étrangers, et surtout au magnifique Grand Danois, qui n'a jamais été un chien Allemand, qui ne chasse pas spécialement le sanglier, et dont l'existence et le nom étaient déjà universellement connus, alors que personne au monde ne soupçonnait même l'existence d'un mastiff Allemand. D'ailleurs toutes les sociétés canines sans exception, y compris le Kennel Club, les sociétés belge, française, hollandaise, etc … refusent d'admettre que le Grand Danois puisse à un titre quelconque être rangé parmi les soit disant Dogues allemands.